A toi petite plume,
C’est une histoire triste et banale au final.
Toi, petit perroquet né dans un élevage, tout beau tout propre.
Spécialisé depuis des années et sure de faire du travail de qualité.
Tu étais dans ton œuf quand tu as rejoint la belle couveuse de compétition Hi Tech.
Tu as vu le jour sur un papier de sopalin sous une lampe chauffante d’un beau rouge.
Pas de maman ni papa….
Juste des sans plume aux heures des repas qui te donnent une seringue et changent le sopalin.
Attention, ils se sont souciés de ta socialisation… Quand tu as commencé à tenir sur tes pattes et à te plumer, ils t’ont mis avec d’autres plumes, c’est déjà pas mal non ?
Bon c’est sûr qu’entre bébés vous ne vous êtes pas appris grand-chose, mais bon…
Ils n’avaient pas mieux à proposer, le temps est compté pour ces usines à billets.
Et puis à 2 mois et demi alors que tu as encore besoin de deux repas à la seringue par jour, que tu commences juste à découvrir la nourriture, tu as fait le grand voyage.
Dans une caisse et hop hop hop en route pour l’animalerie.
Super toi qui n’avais vécu que dans un environnement confiné, tu te retrouves exposé dans une cage à la vue de tous. Sous un éclairage artificiel allumé de 8 h du matin à 20h le soir en moyenne.
Bien sûr, tu es perdu, ça déambule, ça crie, ça tapote sur la cage. Et puis cette musique et ces annonces non-stop.
La sieste de l’après-midi… bin on oublie, trop de bruit, trop de passage, impossible de s’isoler un peu.
Pourtant tu es fatigué… Normal tu n’es qu’un bébé.
Et puis comme dans cette animalerie on est aussi spécialisé dans les perroquets, un jour, on t’attrape et on te coupe les deux ailes. Rémiges primaires et secondaires.
Toi tu as peur, tu cries, tu essaies de pincer de te sauver mais à quoi bon, tu n’es qu’un bébé…
Puis ils te remettent dans ta cage, et là tu ne comprends rien, tu tombes… avant quand tu faisais des petits sauts, tes ailes freinaient la chute et tu commençais à battre des ailes… Tu t’entrainais pour le jour ou tu volerais… mais ce jour est bien loin maintenant.
Et puis un jour un visiteur t’a choisi. Il a eu le coup de cœur pour toi.
Formidable, une vraie vie de famille. Il a fait toutes les démarches, il veut faire tout bien.
Il achète la grande cage, les jouets, etc… tout ce que lui conseille le vendeur.
Un vendeur qui est surtout formé au remplissage du panier moyen, malheureusement pour toi, petite plume et quasiment aucune connaissance sur tes besoins…
Et quand ton visiteur veut te toucher, toi tu veux juste
pincer, crier et t’enfouir et tu tombes et tu te blesses… Et ton
visiteur est encore plus perdu…
Alors tu continues, une plume, deux plumes, trois plumes….
Le visiteur va venir te chercher pour te mettre dans la grande cage avec plein de jouets.
Il veut faire les choses bien, il pense faire les choses bien…
Mais toi tu es juste perdu, tu ne veux plus de ces mains qui te font
peur… Tu ne veux plus de contacte avec ces sans plume qui te font peur
aussi. Et comme vous ne vous comprenez pas du tout, toi et ton
visiteur, et bien tu commences par enlever une puis deux puis trois
plumes…
Tu es en train de devenir une sans plume…
Tu vas voir un super docteur pour les plumes qui dira que c’est normal, les perroquets c’est comme ça ! Et il va te mettre sous anti dépresseur, une bonne dose de cheval !
Tu n’as pas un an…
Tu ne joues plus, tu attends dans ta prison dorée condamnée à la perpétuité sans espoir de remise de peine.